Péremption en appel : effet des diligences des parties et rôle du conseiller de la mise en état

Dans le cadre d’une procédure d’appel, l’article 386 du Code de procédure civile prévoit que l’instance est périmée lorsqu’aucune partie n’accomplit de diligences pendant deux ans. Par la péremption de l’instance, le jugement acquiert alors force de chose jugée. Ainsi, puisqu’il est irrévocable, il ne peut plus faire l’objet d’aucun recours.

Dans l’affaire portée devant la Cour de cassation, une association avait interjeté appel d’un jugement rendu par la juridiction prud’homale dans un litige l’opposant à un salarié. Le conseiller de la mise en état avait rejeté l’incident de péremption soulevé par le salarié, qui avait alors formé un pourvoi en cassation contre l’arrêt confirmant l’ordonnance au motif que l’appel constitué par l’association, n’ayant donné lieu à aucune diligence pendant plus de deux ans, devait être déclaré périmé.

La question était donc de savoir si l’absence d’initiatives procédurales des parties, pendant cette période, permettait de constater la péremption ou, à défaut, si la situation pouvait s’expliquer par des circonstances échappant au total contrôle des parties. La haute juridiction a alors été amenée à interpréter les articles 908, 909, et 910-4 du Code de procédure civile, dans leur rédaction issue du décret n°2017-891 du 6 mai 2017, à la lumière de l’article 6, §1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Tout d’abord, la Cour de cassation rappelle, en application de l’article 910-4 du Code de procédure civile, que les parties sont tenues de présenter toutes leurs prétentions sur le fond dans les délais impartis. Lorsque cette obligation est remplie, il revient au conseiller de la mise en état de fixer les dates de plaidoirie et de clôture, conformément à l’article 912 dudit Code. Cependant, il ressort de la pratique que la surcharge des cours d’appel peut empêcher la fixation d’une audience dans un délai raisonnable, souvent supérieur à deux ans.

Jusqu’alors, la Cour jugeait qu’en matière de procédure d’appel avec représentation obligatoire, la péremption de l’instance d’appel est encourue lorsque, après avoir conclu en application des articles 908 et 909 du Code de procédure civile, les parties n’ont pas pris d’initiative pour faire avancer l’instance ou obtenir, du conseiller de la mise en état, la fixation des débats (cass. civ 2ème du 16 décembre 2016, n°15-27.917).

Cependant, cette jurisprudence a été reconsidérée par l’entrée en vigueur du décret du 6 mai 2017, qui a introduit l’article 910-4 précité, imposant aux parties de présenter, dès les conclusions, l’ensemble des prétentions sur le fond, à peine d’irrecevabilité relevée d’office.  

Par conséquent, la péremption d’instance ne peut être encourue lorsque les parties ont respecté leurs obligations procédurales, et que le blocage résulte d’une carence du conseiller de la mise en état. Dès lors, dans de telles situations, le délai de péremption ne court plus contre les parties.

Ainsi, la Cour de cassation considère que ni le salarié ni l’association n’avaient manqué à leurs obligations procédurales. Elle confirme que dans ce contexte, la direction de la procédure échappait au contrôle des parties, etqu’il appartenait au conseiller de la mise en état d’agir pour fixer les délais d’instance.

Arrêt de la deuxième Chambre civile de la Cour de cassation du 7 mars 2024, n°21-20.719

Consultez nos experts

Filor Avocat propose une consultation personnalisée en visio-conférence auprès des avocats associés du cabinet et cela quelque soit votre demande.
Voir toute l'équipe

Sophie Ferry

Contentieux Droit pénal Avocat associé

Nous consulter

Filor Avocats propose une consultation personnalisée en présentiel ou en visio-conférence quelque soit votre demande.
Nous consulter